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Témoignage (suite )
par Hakim AZ
Suite des articles précédents .
Le village de Tassaft vu d' Ath Ali Ouharzoune ( mars 2012)

Vers 11 heures , trois gendarmes sortirent du mess pour « s’occuper » de moi . L’un d'eux s’assit sur une chaise pliante et de mon corps frêle il fit une boule qu'il faisait tournoyer pendant que ses deux collègues m'assénaient des coups , n’épargnant aucune partie de mon corps , tout en me harcelant de questions… . Abasourdi , complètement assommé , je ne sais pas encore aujourd'hui ce que j'ai répondu sous cette torture , étant chétif de nature et totalement épuisé par une nuit sans sommeil , comme si j’avais le pressentiment du malheur qui allait s’abattre sur nous Très affaibli par ce supplice , on m'embarqua à l'arrière d'une jeep, coincé entre Vrirouch et deux gendarmes . Arrivés à Tassaft Ouguemoun , dans l'enceinte de la gendarmerie on me désigna un coin où je devais me tenir tranquille pendant qu’on conduisait Vrirouch à l'intérieur du bâtiment A la fin de la journée on me dirigea vers un bureau où un gendarme m’accueillit avec un coup de poing en pleine figure et , comme je commençais à saigner du nez , il m’ordonna de me servir de ma chéchia ( calotte ) comme récipient … pour ne pas salir le parterre . Un autre gendarme « tapait » sur une machine à écrire pour rédiger un semblant de PV : « - Qui est venu chez vous ? – Où l'avez vous caché ? - Était-il blessé ? … » . On me tordit le bras pendant qu’on fouillait mes poches pour en sortir finalement un morceau de tissu qui me servait de mouchoir et deux bouts de crayons de couleur …. « Ah , tu ne veux pas parler et bien nous allons te faire cracher le morceau et vite » On m'allongea alors par terre et sadiquement un gendarme fixa les électrodes de son engin de torture , à l’aide de pinces , sur les parties les plus sensibles de mon corps et en avant la gégène ! ( Gégène , terme voulant dire , dans le jargon militaire , dynamo électrique)… Ma tête se mit à cogner contre le sol et mon corps à trembler comme si j'avais une crise d'épilepsie…. L’opération fut renouvelée plusieurs fois durant l’interrogatoire : « - Qui est venu chez vous la nuit dernière ? - Qui lui a ouvert la porte ? - Où l'avez - vous caché ? - Comment s' appelle - t- il ? - Etait-il blessé ? - Qui a tué ton oncle ?.... …» à suivre .
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Commentaire de kamel1 (05/04/2012 14:24) :
Voila un témoignage qui nous éclaire davantage sur les supplices endurés
par la population de notre village sous occupation de l'armée coloniale et
de ses supplétifs .Même les enfants n'ont pas été épargnés et Hakim en
était un au moment des faits ! Merci pour ce travail de mémoire . Nous
attendons la suite .
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Commentaire de Oranaise (06/04/2012 12:03) :
Salut Hakim . Tu sais ton histoire commence à devenir passionnante ,
émouvante . Torturer des adultes , c'était une pratique courante chez
l'armée française et ses "vendus"... mais supplicier des enfants relève du
sadisme et même plus ( je ne trouve pas le mot approprié ). Notre village,
comme toute l'Algérie , a payé cher sa liberté . Bon courage et au
prochain article .
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Témoignage (suite )
par Hakim AZ
Souvenirs d'un gamin à chachia rouge ( suite ) . Aux questions de mes bourreaux je répétais inlassablement : « - Je n'ai vu personne et personne n'est venu chez nous . - Je suis constamment à l'école avec mon instituteur , monsieur Breuil Daniel , même le dimanche … » . Après cette torture on me fit descendre , sous bonne garde , par un dédale de couloirs et d'escaliers , dans une cave où on me jeta une couverture , une bouteille d'eau et deux pommes de terre bouillies. Le lendemain, on me ramena , encore une fois , dans la cour de la gendarmerie , au même endroit que la veille , pour me laisser debout , adossé à un mur…

Tachoucht
A un moment de la journée , je vis des gendarmes trainer deux formes humaines , couvertes de sacs de jute , qu’ils « enfoncèrent » dans la malle d’une voiture , une « Prairie bleue » qui démarra à toute vitesse vers "Tachoucht" sur la RN 30 ….. Le soir , on me tortura de la même manière , dans le même bureau , mais cette fois-ci , à la fin du supplice , au lieu de me descendre dans la cave , on m’enferma dans un cagibi où se trouvait déjà Vrirouch . Quel soulagement pour moi de retrouver une présence familière ! . Assis à même le sol , dans cette cellule très étroite et froide , Vrirouch , recroquevillé dans sa kachabia commença d’abord par essayer de me remonter le moral avant de me raconter un bout des événements à l' origine de notre détention …. A suivre .
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Témoignage (suite )
Par Hakim A.Z.
Souvenirs d'un gamin à chachia rouge (suite)
Vrirouch raconte : « C’est l’incursion d’un commando de moudjahidines qui a provoqué la violente fusillade au village … Cette nuit-la j’étais de garde en compagnie d' A…n…, dans le cadre de l'autodéfense , à vava Ouchabane , lorsque , brusquement , nous fûmes maîtrisés par le commando qui nous déposséda de nos fusils Garant et des quatre cartouches dont on nous dotait chaque soir , avant de rejoindre nos postes . Les moudjahidines , qui nous désarmèrent facilement , ciblaient sûrement le sergent M ……qu'ils étaient venus éliminer … Mais ce soir-la , le sergent M… chargea son adjoint , un certain Boufaid (un ex moudjahed , un rendu , comme on disait à l’époque) pour effectuer la ronde à sa place pour s’assurer que les auto-défenseurs s’acquittaient correctement de leur tâche ... Boufaid et sa chienne qui le précédait , furent exécutés à l'arme blanche , pour ne pas attirer l’attention des soldats français et de leurs supplétifs . Le commando attendit en vain le sergent en question jusqu’au moment où un certain R…, un harki , qui , pris de panique , donna l'alerte en mitraillant dans tous les sens dans les ruelles du village … » .
Ouchavane
Au cinquième jour de ma détention , nous étions de corvée dans la cour de la gendarmerie et mon rôle consistait à ranger les bûches de bois que les autres prisonniers débitaient …lorsque , vers quatre heures , le brigadier m'appela : « He ! petit , viens donc ouvrir le portail … , … tu es libre » . Il promit de téléphoner au P 12 (camp militaire installé à l’entrée de notre village) pour qu'on me laisse rentrer chez moi. Malgré mon état physique lamentable , je pris mes jambes à mon cou, empruntant la RN 30 jusqu'au camp militaire P 12 où on me laissa effectivement passer. Au village, le premier qui vint à ma rencontre (coïncidence ou averti de ma libération ?) fut mon instituteur , monsieur Breuil Daniel , qui s'assura d’abord que je n'avais rien de cassé et que les gendarmes ne m'avaient pas trop abimé et puis il me dit : « va vite rejoindre ta mère qui t'attend ! » à suivre.
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Commentaire de Idir52 (09/04/2012 20:17) :
Si ma mémoire ne me fait pas défaut,
Je crois que Boufaid (Originaire de Agueni-Oufourou, a été découpé à l'arme
blanche en lieu ( Lemrafik devant la porte de la maison de Da Amrane Ath
Lekhal),le chien Baroud à été éventré au couteau au niveau du poteau
électrique de Vav-Ouchavane menant vers Lemrafik.
Idir Ouabdesselam
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Commentaire de aitali-ouharzoune-retour-aux-sources (04/03/2014 16:49) :
Message de Valérie BREUIL - Sujet : « Daniel Breuil, instituteur à Aït Ali
en 1960-1961 »
Bonjour, Je suis Valérie Breuil, fille de Daniel Breuil, instituteur à Aït
Ali Ouharzoune en 1960-61 et cité dans le témoignage de Hakim
A.Z.(manuscrit et guerre de libération nationale, p 27). Bellaïd l'avait
également contacté en août 2012 alors qu'il était en vacances. Profondément
ému par l'article du blog et l'appel téléphonique de l'été 2012, il
aimerait pouvoir échanger avec ses anciens élèves (Brahim, Bellaïd, Ahmou,
Ahmid, ...) dont il a gardé un vif souvenir. A qui écrire ? téléphoner ? A
quelle adresse mail ? Merci d'avance à vous tous pour lui. Bien
cordialement en espérant vous lire bientôt, Valérie Breuil
http://aitali-ouharzoune-retour-aux-sources.vip-blog.com/
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Commentaire de youcefay (04/03/2014 22:50) :
Bonjour Valérie, j'ai connu votre père il était l'un de nos meilleurs
instituteur en 1960/61, j'étais au CM2, je me souviens des derniers jours
de son départ du village, il avait pris beaucoup de photos si mes souvenirs
son bon il nous a même filmé avec une ancienne caméras (super 8) si il les
a encore je voudrais bien les voir sur le blog
vous pouvez être fière de lui car grâce à lui, une bonne partie de ses
anciens élevés ont bien réussi la suite de leurs études
dite moi s'il est toujours en forme, il doit avoir environ aujourd'hui 75
ans.
plus tard, je pourrais vous communiquer la liste de ses élevés. Je suis AIT
YOUNES YOUCEF. vous lui passerez un bonjour, je suis très content de votre
contact j'attends le retour de mon commentaire. A BIENTOT
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Commentaire de aitali-ouharzoune-retour-aux-sources (09/03/2014 13:16) :
AZOUAOU ABDELHAKIM Bonjour da Hamid, Je n'ai pas pu accéder à ton blog
Permets- moi de te transmettre directement la réaction de mon père Brahim
au message de Mme Valérie Breuil en date du 04/03/2014 . Brahim : « ce
message m'a donné du baume au cœur et m'incite à chercher une formule,
aussi modeste soit -elle , pour rendre encore hommage à ce grand homme
qu'est Mr Daniel Breuil . En attendant je l’invite à apporter, si possible
, quelques éclairages sur cette période(1960/1961) , à donner son avis sur
les moments vécus avec nous et sur mon témoignage publié sur le blog Ait
Ali Ouharzone . Nous lui serons très reconnaissants. S’il détient encore
des souvenirs de son passage en Kabylie : (photos, films , témoignages
écrits ou autres documents) je lui demande de les insérer dans notre blog
, avec le consentement de da hamid. Je me souviens, qu’à la veille de sa
libération (la quille) , une cérémonie a été organisée ,en son honneur ,
dans la cour de l'école. Monsieur Daniel a été décoré par sa hiérarchie et
ma mère, présente sur les lieux, avait insisté pour envoyer un cadeau à
Madame Breuil, un foulard Kabyle brodé ( "amendil"). La cérémonie s’était
achevée par une distribution de prix pour les meilleures élèves » .brahim
Azouaou cordialement.
http://aitali-ouharzoune-retour-aux-sources.vip-blog.com/
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Commentaire de aitali-ouharzoune-retour-aux-sources (10/03/2014 08:05) :
mar 9 à 11h35 PM
Bonjour,
Je suis touchée et heureuse des réponses apportées par Brahim (via son fils
Azouaou Abdelhakim) et Ait Younes Youcef. Papa, à qui j'ai communiqué ces
témoignages, en est également très touché émotionnellement.
Je voulais préciser que papa, alors âgé de 78 ans, va bien. Il a entrepris
depuis quelques temps d'écrire, sinon un livre du moins un témoignage
personnel, sur cette période passée à Aït Ali Ouharzoune. C'est à cette
occasion qu'il m'a demandé de voir, via votre blog, s'il pourrait entrer en
contact avec d'anciens élèves qu'il n'a jamais oubliés, voire plus, qu'il a
très souvent cités en exemple tout au long de sa longue carrière
d'instituteur en France.
Dans cette démarche d'écriture qu'il a entreprise, nous avons également
retrouvé les nombreuses photos qu'il avait faites à cette époque. Nous
proposerons d'en mettre sur le blog. Je vais également l'inciter à écrire
un article sur le blog afin que les contacts et les échanges soient plus
concrets.
Bien cordialement,
Valérie Breuil
http://aitali-ouharzoune-retour-aux-sources.vip-blog.com/
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